Le Power Pure en trois leçons
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Entre 2000 et 2008, les ventes de pneus Hypersport et Sport ont doublé", observe Ross Shields, responsable marketing chez Michelin. Or, après une année 2009 en recul, les professionnels tablent sur une reprise dès cette année : "
les motards ont décalé leur remplacement de pneus, mais ils vont se réapprovisionner en 2010"...
C'est dire si la naissance du Power Pure, en gestation depuis trois ans, tombe à pic pour le manufacturier de Clermont-Ferrand : grâce à lui, le Bibendum se vante d'offrir la gamme la plus récente et la plus complète du marché.
L'offre du spécialiste français se compose donc du Pilot Road 2 (datant de 2007) pour les gros (en)rouleurs, le Pilot Power 2CT (2006) pour les amateurs d'arsouilles à moindre prix, le Power Pure (2010) pour les motards avides de nouvelles technologies, et les Power One (2009), "Street" pour les mordus de circuit et "Compétition" pour les affamés de podiums.
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Le Pure s'adresse effectivement à la même clientèle que le 2CT, mais nous conservons cette référence afin de satisfaire nos distributeurs et leurs clients en quête de bonnes affaires", nous précise un membre du staff Michelin. D'ores et déjà disponible dans le commerce, un train de Power Pure se monnaye aux alentours de 270 €, tandis que le même train en Pilot Power 2CT se négocie une trentaine d'euros moins cher.
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Apprécié pour sa maniabilité, le 2CT devait être remplacé afin de mieux correspondre aux performances des toutes dernières sportives", remarque toutefois Romain Boucher, ingénieur spécialisé dans l'analyse du comportement des deux-roues chez Michelin. "
Or nous avons choisi d'améliorer encore la maniabilité sur le Pure !"
Dans ce but, les ingénieurs des différents services R&D ont oeuvré conjointement pour alléger le plus possible leur bébé Bibendum : "
nous avons mis tout le monde autour d'une table, ce qui ne s'était jamais fait auparavant", insiste notre interlocuteur.
Peu loquaces sur la nouvelle composition des gommes, les tout nouveaux designs et tailles de moules de cuisson - la concurrence aussi est abonnée à la newsletter de Moto-Net.Com... -, les responsables de Michelin nous assurent que le grip sur le sec et sur mouillé, la maniabilité, la sensation et la longévité de leur pneu n'ont pas été sacrifiés sur l'autel du poids !
Baptisée LTT pour "Light Tire Technology", cette nouvelle technologie "Made in France" a tout de même permis à Michelin de créer "
le pneu sport premium bi-gomme le plus léger jamais conçu". D'après les Auvergnats, un train de pneus Power Pure affiche 1 kg de moins que la concurrence sur la balance (lire notamment
MNC du 15 janvier 2010 : Michelin joue la carte du poids avec le Power Pure) et 650 g de moins qu'un ancien 2CT !
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Certes, par rapport au poids total d'une machine de 200 kg, ces gains peuvent paraître dérisoires", avoue Romain Boucher dans un premier temps, "
mais il s'agit tout de même de faire perdre à un train de pneu environ 10% de sa masse et de jouer en premier lieu sur la masse "non suspendue" de la moto".
Fatalement, des roues plus légères perdent en inertie : "J = m.r2", s'empresseront de réciter les plus scientifiques ! D'après ses savants calculs, le Bibendum établit le gain en inertie de 10% par rapport à la concurrence.
Et parallèlement, cette baisse de masse non suspendue facilite et affine le travail des suspensions. Plus mobiles, les roues s'adaptent mieux au relief du revêtement parcouru : le moteur et les freins bénéficient d'un meilleur grip et le motard peut rouler plus sereinement ou attaquer plus fort selon les circonstances.
Ces améliorations, le Pure les doit notamment à son régime 100% fibres aramide "
10 fois plus légères et aussi résistantes" que les câbles en acier traditionnels auxquels elles se substituent désormais entièrement, à l'exception de la tringle qui assure l'étanchéité du pneu sur sa jante.
En revanche, Michelin jure ne pas avoir joué sur la hauteur de gomme à user : de visu, la gomme de la bande de roulement semble effectivement épaisse. Ou "les gommes" devrait-on plutôt dire, puisque le Power Pure repend à son aîné la technologie 2CT
Bien évidemment, il s'agit "
d'une nouvelle génération de 2CT", affirment les hommes de Michelin. En effet, par rapport au Pilot Power 2CT, une part sensiblement plus grande est offerte à la gomme plus tendre disposée sur les flancs - à l'avant comme à l'arrière - sur le nouveau Power Pure.
De plus, le nouveau Michelin bénéficie des derniers progrès effectués par les ingénieurs en matière de mélanges de gomme - tenus secrets, cela va sans dire -, élaborés en étroite collaboration avec le Power Research Team (lire
MNC du 13 mars 2009 : :le Bibendum court toujours...).
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Les mélanges de la bande de roulement du Michelin Power Pure utilisent le même type de silice que les pneus intermédiaires utilisés en endurance, pour une meilleur polyvalence sec /mouillé", dévoile ainsi le manufacturier auvergnat.
Afin de disposer de performances encore supérieures sur revêtement humide, les ingénieurs Michelin ont par ailleurs choisi de calquer partiellement la sculpture "fontaine" utilisée sur les pneus pluie de compétition sur leur nouveau né censé, pour rappel, passer 80% de son temps sur route et 20% sur circuit.
Balade dans les fjords andalous...
Il s'avère fort heureux que Michelin ait aussi soigneusement travaillé le grip sur le mouillé de sa nouveauté 2010, car au moment même où nous chevauchons les motos pour nous élancer sur le parcours routier concocté par nos hôtes, quelques flocons font leur apparition !
Menée tambour battant par un essayeur Michelin, la promenade à travers les magnifiques "fjords andalous" ne dure pas plus d'une heure, sur des routes détrempées et par endroit extrêmement souillées. Évidente de prise en main, la Honda CBR1000RR choisie par Moto-Net.Com pour débuter cet essai se montre parfaitement docile.
Si les prises et changements d'angles ne sont encore ni importantes ni vifs, la stabilité et la motricité des Power Pure font merveilles dans ces conditions délicates ! Calée dans les grandes courbes des voies express ou virevoltant d'une petite rue à l'autre, la Honda répond au doigt et à l'oeil.
En l'absence d'autres montes de pneus, difficile - impossible, même ! - d'affirmer si les pneus français sont meilleurs que leurs concurrents japonais, britanniques, italiens ou allemands... À l'issue de cette petite balade en revanche, on peut conclure avec certitude que les Power Pure combleront les possesseurs de sportives, surtout françaises : 100 chevaux ne viendront pas à bout du grip de Power Pure
En effet, c'est ce que nous a permis de tester une deuxième boucle effectuée au guidon de la petite Yamaha R6 : le soleil et le vent d'Almeria aidant, les routes deviennent de plus en plus sèches et permettent au 4-cylindres petit mais rageur de s'exprimer pleinement !
Pas une amorce de glisse à déplorer, rien : les excellentes suspensions de la Yam' gomment les nombreuses imperfections du bitume espagnol, "bien aidée par le kilogramme de moins à mouvoir au niveau des roues grâce au Power Pure"... C'est théoriquement démontré, empiriquement plus difficile à vérifier.
Équipée des tout nouveaux Michelin, la Supersport des Bleus - championne du monde avec Cal Crutchlow SVP - est aussi incisive que saine. Les manoeuvres de dernière seconde pour éviter ici une pierre et là une coulée de boue sont de simples formalités.
Sur route donc, le bilan est très satisfaisant : à la fois neutres et agiles, les jeunes Bibendum offrent un excellent grip en toutes circonstances. "
L'inertie et l'effet gyroscopique moindres de la roue avant permettent en outre de diminuer les efforts au guidon tout en conservant la même efficacité : on se fatigue moins", nous assure un pilote essayeur Michelin.
Malheureusement, seul un roulage beaucoup plus long que celui effectué lors de cette présentation permettra de vérifier ses dires... En raison des mauvaises conditions, le parcours a en effet été réduit à une soixantaine de kilomètres : vraiment pas de quoi entamer la vigueur d'un essayeur MNC ! Chers lecteurs, n'hésitez donc pas à livrer vos sensations en postant un commentaire à la fin de cet article.
Arsouille sur la piste d'Almeria
Amenés à rouler sur circuit de manière occasionnelle, les Michelin Power Pure ont également été testé par la presse sur la sympathique piste d'Almeria ! Sachant le tracé relativement difficile à mémoriser, MNC a repris le guidon d'une Fireblade, histoire de se concentrer davantage sur les trajectoires et les pneus.
Une fois encore, la satisfaction est au rendez-vous : le temps de chauffe passe inaperçu. "
Ils montent très vite en température", confirme le pilote William Costes, "
et ce qui est bien également, c'est qu'ils ne surchauffent pas ensuite : ils restent entre 60 et 65°C".
Même dans la fournaise de Sepang où les Power Pure ont été maltraités par les pilotes essayeurs, "
la température des pneus ne dépassait pas les 70°C", nous affirme Romain Boucher, ingénieur chez Michelin. De quoi assurer aux nouveaux pneus une longévité hors pair ? Pas sûr !
Alerté par les quelques bouloches présentes sur le gommard en fin de première session, nous optons au cours de la seconde session pour une nouvelle puissante Superbike - mince, la BMW est déjà prise, va pour la GSX-R 1000... - afin de tester la résistance de la gomme.
À une seule reprise, lors d'un changement de vitesse un peu brutal, le pneu arrière de la Gex se dérobe momentanément à l'accélération. Autrement, en pilotant proprement, le grip au freinage, sur l'angle et à la relance est imperturbable : la gomme tendre, dont on profite plus tôt que sur le 2CT remplit parfaitement son rôle.
De même, les changements d'angles s'exécutent aisément. Plus aisément - on s'en serait douté mais Michelin a tenu à nous le faire "sentir" - que lorsque les jantes des motos sur lesquelles sont montés les Michelin Power Pure sont lestés de 1,5 kg !
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Cette surcharge correspond au kilogramme de pneu supplémentaire qu'accuse la concurrence ", estime en effet Michelin. Sur la même chicane du tracé andalou, franchie à la même vitesse sur la même moto équipé des mêmes pneus mais soumises à une plus grande inertie la différence est palpable.
Attention toutefois : l'adoption de Michelin Power Pure ne suffira pas à transformer votre tank - on ne visera personne - en une bicyclette !
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Sur piste, l'avantage d'amoindrir l'inertie des roues réside dans le fait que pour un même effort, la vitesse de carrossage (vitesse de passage d'un angle à un autre, NDLR)
augmente : on gagne donc du temps sur le chrono final", résume un pilote essayeur Michelin.
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Après, si le grip des Power Pure ne suffit plus au motard chevronné, il peut toujours passer sur du Power One, dont l'objectif principal est de passer la puissance au sol", poursuit malicieusement William Costes (lire
MNC du 13 mars 2009 : Les pneus français plus compétitifs que jamais !)...
La remarque vaut également en cas de dégradation trop rapide du pneu arrière : "
il existe des tas de références sur le Power One qui siéront mieux à des utilisations plus sportives, voire à des tracés réputés abrasifs", nous rappelle le responsable marketing Ross Shields (lire
MNC du 13 mars 2009 : Michelin innove à tous les étages !).
On en arrive donc à l'unique point sur lequel le Michelin nous a laissé perplexe : sa longévité. Censé durer aussi longtemps que le Pilote Power 2CT, les Power Pure n'avaient pas fière allure à la fin de notre session sur la Superbike de Suzuki...
Les amateurs de journées piste et/ou possesseurs d'hypersportives très puissantes - comprenez Full Power - devront sans doute modérer leurs ardeurs pour faire durer leur "léger" train de pneus Michelin...
Bon point toutefois pour le nouveau Michelin - qui pourrait bien balayer nos inquiétudes à ce sujet - : la Yamaha R1 2010 sera livrée en Power Pure ! Alors, les utilisateurs du 4-cylindres au calage crossplane viendront-ils à bout des nouveaux Michelin ? Mystères et boule de gomme... Restez connectés, et n'oubliez pas de commenter !